Les événements stressants de la vie sont associés à l’apparition de la schizophrénie de même qu’à l’aggravation des troubles psychotiques. Il a été démontré que l’âge et le sexe sont d’importants médiateurs du risque entre le stress vécu et l’apparition ultérieure d’une psychose. Durant une session du symposium scientifique intitulé « Excitation/Inhibition Balance as a Primary Etiological Factor in Schizophrenia: Why Age of Insult and Sex Matters », le Pr Anthony Grace, University of Pittsburgh, a décrit quelques-uns des fondements biologiques et a notamment expliqué comment le stress affecte divers circuits neuronaux du cerveau durant les périodes de développement clés.
Les événements stressants de la vie survenant durant l’adolescence peuvent donner lieu à des altérations cérébrales de longue durée
De nouvelles données semblent indiquer que l’adolescence est une période de vulnérabilité associée à un risque accru d’effet négatif du stress émotionnel, comme l’exposition à la victimisation, à l’intimidation, à l’abus sexuel et à la précarité socio-économique. En général, chez les adolescents prédisposés aux troubles psychotiques, on observe une réactivité anormalement forte aux événements stressants de la vie, et il peut en résulter des adaptations de longue durée dans le cerveau. Des études chez l’animal ont révélé que l’exposition au stress au moment de la puberté entraîne un état hyperdopaminergique qui perturbe l’équilibre entre l’excitation et l’inhibition dans l’hippocampe par l’intermédiaire d’une perte d’interneurones à parvalbumine, type de neurone inhibiteur qui régule les circuits de neurones corticaux et sous-corticaux. Ces interneurones étant perturbés chez les personnes atteintes de schizophrénie, ils pourraient jouer un rôle critique en tant que médiateur reliant le stress prépubertaire et l’apparition d’une psychose à l’âge adulte.
Le stress survenant durant la puberté perturbe l’équilibre entre l’excitation et l’inhibition dans l’hippocampe
Réponses au stress différentes selon le sexe
Le Pr Grace et ses collaborateurs se sont penchés sur les effets de l’exposition aux stimuli stressants à différentes périodes du développement (prépubertaire et postpubertaire) chez des rats, puis les ont suivis jusqu’à l’âge adulte. Ils ont constaté que l’effet de l’exposition au stress sur le cerveau variait chez les rats mâles et femelles. Plus précisément, ils ont observé une augmentation de la cadence de tir des neurones dopaminergiques dans l’hippocampe en réponse au stress prépubertaire chez les rats mâles alors que, chez les rats femelles, l’activation dopaminergique survenait seulement en réponse au stress postpubertaire.
L'exposition au stress durant l’adolescence affecte différentes structures et fonctions du cerveau, ce qui donne lieu à différentes fenêtres de vulnérabilité à la psychose selon le sexe
Les chercheurs ont aussi observé des différences selon le sexe dans d’autres régions du cerveau en réponse au stress vécu à divers stades de l’adolescence. Par exemple, l’amygdale basolatérale des rats mâles exposés au stress prépubertaire montrait une densité moindre d’interneurones à parvalbumine qui persistait à l’âge adulte, alors que cet effet était absent chez les rats mâles et femelles exposés à un stress postpubertaire.
Rôle protecteur des filets périneuronaux
L’adolescence est aussi une période critique pour le développement des filets périneuronaux, gaines entourant les interneurones à parvalbumine qui les protègent contre les altérations métaboliques et oxydatives. Par conséquent, l’exposition au stress avant que les filets périneuronaux parviennent à maturité pourrait rendre les interneurones à parvalbumine plus vulnérables à une altération et constituer un lien biologique critique entre le stress vécu au début de la vie et la vulnérabilité à l’apparition ultérieure de la schizophrénie.
Fenêtres de vulnérabilité
Ces observations donnent tout lieu de croire que les fenêtres de vulnérabilité varient selon le sexe, et que l’exposition au stress n’affecte pas les mêmes structures et fonctions du cerveau dans les deux sexes. Le Pr Grace a émis l’hypothèse voulant que ces fenêtres de vulnérabilité puissent contribuer aux différences observées quant au moment de l’apparition de la psychose et à la sévérité des symptômes chez l’humain, les garçons ayant des symptômes psychotiques plus précoces et plus sévères. Les jeunes filles, en revanche, semblent protégées des effets de l’exposition précoce au stress alors que l’exposition à un trauma en fin d’adolescence pourrait accroître leur vulnérabilité aux troubles affectifs à l’âge adulte.
Les symptômes psychotiques sont généralement plus précoces et plus sévères chez les jeunes hommes que chez les jeunes femmes
Les faits saillants du symposium rapportés par nos correspondants se veulent une représentation juste du contenu scientifique présenté. Les opinions et les points de vue exprimés sur cette page ne reflètent pas forcément ceux de Lundbeck.