Intégration de la pleine conscience et de la méditation dans l’arsenal de prise en charge de la migraine

La migraine est une maladie neurologique répandue et débilitante, dont la prise en charge repose idéalement sur un plan de traitement complet multimodal. Les habitudes de vie et les stratégies comportementales forment l’un des piliers d’une prise en charge efficace : elles peuvent contribuer à prévenir et à traiter les crises migraineuses, mais surtout, elles peuvent aider les personnes aux prises avec la migraine à mieux vivre avec leur maladie. Lors d’un webinaire commandité par Migraine Canada, Christie Tait, infirmière praticienne spécialisée en traitement de la migraine et en mieux-être, et Natanya Mandel, formatrice en gestion de la migraine et professeure de pleine conscience, ont présenté les plus récentes données à l’appui des effets bénéfiques de la pleine conscience et de la méditation sur le cerveau, et prodigué des conseils pratiques pour intégrer ces pratiques dans un plan multimodal de prise en charge de la migraine.

Pleine conscience et méditation : définitions

Au chapitre des stratégies de prise en charge des maladies chroniques axées sur les habitudes de vie et le comportement, la « pleine conscience » est une notion à la mode, mais elle est mal connue et suscite beaucoup d’idées fausses. Essentiellement, précise Mme Mandel, la pleine conscience consiste à se centrer sur l’instant présent et à porter attention à l’expérience en cours, sans toutefois évaluer ni juger les pensées qui surgissent. Ainsi décrite, la pleine conscience est particulièrement utile dans la gestion des crises migraineuses, parce qu’elle encourage le malade à prendre conscience de ses pensées, de ses émotions et de ses sensations corporelles lors d’une crise migraineuse, et à les accepter sans les juger.

La pleine conscience implique de centrer son attention, délibérément et sans jugement, sur ce qui se passe dans l’instant présent 

Alors que la pleine conscience peut se pratiquer en tout temps, la méditation est une tâche structurée qui implique de diriger son attention et de se concentrer sur un point précis pendant une période déterminée. Il s’agit d’un outil polyvalent qui peut prendre plusieurs formes, le principe clé étant d’adopter selon le moment la forme de méditation la plus bénéfique pour le corps. Mme Mandel souligne toute l’importance, pour une personne aux prises avec une maladie physique, neurologique et/ou douloureuse, d’être à l’écoute de son corps afin de combler ses besoins du moment.

On peut pratiquer la méditation de nombreuses manières : en marchant, en bougeant, en position debout, assise ou allongée, les yeux ouverts ou fermés

Preuves scientifiques de l’impact de la pleine conscience sur le cerveau

Un nombre croissant de données probantes indiquent que, pratiquées régulièrement, la pleine conscience et la méditation peuvent avoir une influence positive sur la structure et le fonctionnement du cerveau. Notamment, il a été démontré que la pratique régulière et formelle de la méditation augmente l’activation neuronale et la neuroplasticité de l’insula, du cortex préfrontal et du cortex cingulaire antérieur – régions du cerveau intervenant dans la conscience de soi, les expériences intéroceptives, le maintien de l’attention et la régulation émotionnelle1. En outre, des études ont montré que la pleine conscience peut améliorer la flexibilité psychologique et atténuer la dépression et l’anxiété2, ce qui est important pour composer avec l’imprévisibilité des crises migraineuses. Lors d’une étude menée chez 89 adultes avec migraine dont l’objectif était de comparer l’efficacité d’un programme de réduction du stress par la pleine conscience (RSPC) à celle de séances éducatives sur les céphalées sur une période de 8 semaines, les chercheurs ont enregistré une réduction significative du nombre de jours avec migraine par rapport aux valeurs initiales dans les 2 groupes; toutefois, dans le groupe RSPC, les chercheurs ont noté également une amélioration significative de l’incapacité liée à la migraine, de la qualité de vie, du sentiment d’auto-efficacité, de la dépression et de la dramatisation de la douleur, ainsi qu’une diminution de la douleur lors de tests de provocation3.

La pleine conscience et la méditation peuvent modifier la plasticité du cerveau et les voies neuronales, induisant ainsi une amélioration de la flexibilité psychologique et une réduction des réactions défavorables dues au stress

Selon Mme Tait, ces observations semblent indiquer que la pleine conscience et la méditation pourraient améliorer la qualité de vie des personnes atteintes de migraine en renforçant l’acceptation, en atténuant l’anxiété et en leur donnant le sentiment d’avoir une prise sur leur maladie, souvent perçue comme incontrôlable.

Stratégies pour pratiquer la pleine conscience 

La pleine conscience et la méditation sont des outils polyvalents auxquels on peut recourir pratiquement en tout temps et n’importe où. En cela, elles se distinguent de la pharmacothérapie, autre outil essentiel à la prise en charge de la migraine, qui implique cependant l’adhésion à un horaire rigide conforme au schéma posologique. Les personnes qui souhaitent apprendre à pratiquer la méditation ou la pleine conscience au quotidien disposent de plusieurs ressources, y compris des applis (p. ex., Calm et BetterSleep), des vidéos YouTube proposant des exercices de méditation guidée, et des cours formels explorant les aptitudes essentielles à l’apprentissage de la méditation et de la pleine conscience. La pleine conscience a également été intégrée dans des thérapies comportementales comme la thérapie cognitivo-comportementale (TCC).

La pleine conscience peut être pratiquée aussi souvent que souhaité, et elle n’entraîne aucun effet négatif

Des participants à des programmes de gestion de la douleur chronique par la pleine conscience (GDCPC) ont témoigné avec gratitude de l’impact positif de la GDCPC sur la douleur, la faculté de composer avec la douleur et les activités quotidiennes. Fait important, les personnes qui pratiquent la GDCPC disent avoir une attitude plus positive, même lorsque survient un épisode de céphalée sévère. Selon Mme Tait, cela résulte d’une amélioration de l’auto-efficacité, de la tolérance à l’inconfort et du sentiment de maîtriser la douleur, ainsi que d’une conscience accrue des symptômes précurseurs d’une crise migraineuse, ce qui permet de traiter plus précocement les épisodes sévères.

La pleine conscience et la méditation demandent du temps et une pratique régulière 

La pleine conscience et la méditation sont des aptitudes qui s’acquièrent avec la pratique, préviennent Mme Mandel et Mme Tait, et il faut s’y adonner pendant au moins 8 semaines pour en ressentir les effets. La pleine conscience et la méditation ne sont pas des remèdes miracles, et les personnes vivant avec la migraine doivent absolument avoir des attentes réalistes. Néanmoins, une fois qu’elles commencent à percevoir les effets bénéfiques de ces pratiques, elles sont motivées à y adhérer de manière régulière.

Pour en savoir plus et accéder à des ressources, consultez les sites Web de Mmes Tait et Mandel, respectivement www.structureclinic.ca et www.natanyacoaching.com, ou suivez-les ici : @the.headache.np et @natanyacoaching.

Les faits saillants du symposium rapportés par nos correspondants se veulent une représentation juste du contenu scientifique présenté. Les opinions et les points de vue exprimés sur cette page ne reflètent pas forcément ceux de Lundbeck.

Références

  1. Young KS et al. Neurosci Biobehav Rev 2018;84:424-33. 
  2. Marais GAB et al. Eur J Investig Health Psychol Educ 2020;10:1035-50. 
  3. Wells RE et al. JAMA Intern Med 2021;181:317-28.