Les anticorps monoclonaux anti-CGRP modifient-ils le cours des épisodes migraineux ou de la migraine? Retardent-ils l’aggravation de l’incapacité et ralentissent-ils l’évolution de la migraine? Ces questions ont alimenté un débat au congrès IHC2021 dont l’objectif était d’inciter à la réflexion.
Tous les anticorps monoclonaux anti-CGRP diminuent significativement le nombre de jours par mois avec migraine (JMM) comparativement à un placebo1.
Dans le cadre d’un débat qui visait à déterminer si les anticorps monoclonaux anti-CGRP modifient l’évolution naturelle de la maladie, la principale question à laquelle l’auditoire devait répondre était la suivante : « Les anticorps monoclonaux anti-CGRP retardent-ils l’aggravation de l’incapacité et ralentissent-ils l’évolution de la migraine? », explique le Pr Dimos Mitsikostas, Athènes, Grèce, qui présidait le débat.
Les anticorps monoclonaux anti-CGRP peuvent effectivement modifier le cours de la maladie
Dans son plaidoyer en faveur de cette proposition, le Pr Lars Edvinsson, Lund, Suède, a fait référence à des études prouvant que les anticorps monoclonaux anti-CGRP peuvent retarder l’aggravation de l’incapacité et ralentir la progression de la migraine.
Les anticorps monoclonaux anti-CGRP améliorent la qualité de vie liée à la santé (QdVs) des patients atteints de migraine pendant au moins 5 ans3.
- Tous les anticorps monoclonaux anti-CGRP diminuent significativement le nombre de JMM comparativement à un placebo1.
- Traitement avec anti-CGRP diminuent le nombre de JMM, principalement en raison de la fréquence mensuelle moindre d’épisodes migraineux; la durée plus courte de chaque épisode joue un rôle mineur2.
- Traitement avec anti-CGRP administrés aux adultes atteints de migraine épisodique diminuent la fréquence des épisodes migraineux et améliorent la QdVs pendant au moins 5 ans3.
- Chez 53 % des patients aux prises avec une migraine chronique traitée par un anticorps monoclonal anti-CGRP, la migraine est devenue épisodique en moins de 12 semaines; dans le cadre de l’étude de prolongation, ce gain se maintenait à 52 semaines chez 96 % des patients4.
- Chez 43 % des patients aux prises avec une migraine chronique traitée par un anticorps monoclonal anti-CGRP, la migraine chronique est devenue épisodique après 12 semaines; dans le cadre de l’étude de prolongation, ce gain se maintenait à 52 semaines chez 78 % des patients4.
Chez la plupart des patients aux prises avec une migraine chronique traitée par un anticorps monoclonal anti-CGRP, la migraine chronique devient épisodique4.
Il est prématuré de qualifier les anticorps monoclonaux anti-CGRP d’agents modifiant le cours de la maladie
Dans son plaidoyer contre la proposition, la Dre Élizabeth Leroux, Montréal, Canada, a expliqué que les traitements modifiant le cours de la maladie doivent modifier l’évolution naturelle de la maladie, au-delà du soulagement des symptômes, et que le processus physiopathologique sous-jacent doit s’en trouver ralenti.
Chez la majorité des patients, la migraine n’évolue pas pendant des dizaines d’années5, et on peut la soulager en remédiant à certains facteurs de risque6. Il n’est donc pas possible de conclure que les anticorps monoclonaux anti-CGRP modifient l’évolution naturelle de la migraine, affirme la Dre Leroux.
Y a-t-il des biomarqueurs qui confirment le ralentissement de l’évolution de la migraine?
De plus, seule une variation mesurable des taux de biomarqueurs permettrait de confirmer le ralentissement du processus physiopathologique sous-jacent, dit-elle; or, aucun biomarqueur ne s’est encore révélé capable de prédire la réponse au traitement de manière systématique chez les personnes vivant avec la migraine.
Cela dit, de nombreux biomarqueurs potentiels sont à l’étude7, ajoute la Dre Leroux. Voici les résultats obtenus à ce jour chez les patients aux prises avec la migraine :
- Taux sérique accru de CGRP entre les épisodes8 (mais d’autres chercheurs ont conclu que le taux sérique de CGRP n’est peut-être pas adéquat9.
- Anomalies de la substance blanche, lésions apparentées à un infarcissement et variations volumétriques de la substance grise et de la substance blanche à l’examen d’IRM10.
- Altération de la connectivité à l’IRM fonctionnelle (IRMf), à la fois durant et entre les crises11.
- Métabolisme énergétique anormal et dysfonctionnement mitochondrial à la spectroscopie par RM et à la tomographie par émission de positons11.
- De nouvelles données probantes montrent que les anticorps monoclonaux anti-CGRP peuvent modifier les éventuels biomarqueurs de la migraine.
La Dre Leroux a lancé les questions suivantes : Les anticorps monoclonaux anti-CGRP pourraient-ils modifier ces biomarqueurs et les changements touchant le cerveau? Les anticorps monoclonaux anti-CGRP pourraient-ils modifier le seuil d’apparition d’un épisode migraineux ou bloquer la cascade neurochimique? À l’appui d’une réponse affirmative à ces questions, il a été démontré que :
- L’administration du CGRP par voie intraveineuse peut déclencher un épisode migraineux qui répond à un anticorps monoclonal anti-CGRP12.
- La réponse à un anticorps monoclonal anti-CGRP est associée à une activation moindre dans le thalamus droit controlatéral (opposé au côté stimulé), le gyrus temporal moyen droit, le gyrus lingual droit, l’opercule gauche et dans plusieurs clusters des deux côtés du cervelet à l’IRMf13.
En conclusion, la Dre Leroux estime qu’il est à la fois exagéré et prématuré de décrire les anticorps monoclonaux anti-CGRP comme des agents modifiant le cours de la maladie.