Lien entre myélinisation, psychose et antipsychotiques

L’hypothèse voulant que l’altération de la myéline joue un rôle critique dans l’apparition d’une psychose suscite un intérêt grandissant chez les scientifiques. Selon certaines études présentées au congrès virtuel de la WSFBP de 2021, les antagonistes dopaminergiques, surtout les antipsychotiques à action prolongée (injectables), seraient associés à un effet de remyélinisation et cet effet serait corrélé avec une atténuation des symptômes cliniques chez les patients atteints de schizophrénie.

L’hypothèse voulant que l’altération de la myéline joue un rôle critique dans l’apparition d’une psychose a été avancée, et il y a toujours plus de données probantes à l’appui d’un rôle central des pathologies touchant la substance blanche dans la schizophrénie, explique le Paolo Brambilla, Physiopathologie et transplantation, Université de Milan, Italie.

L'altération de la myéline pourrait jouer un rôle critique dans l’apparition d’une psychose.

Un manque d’intégrité de la substance blanche a été signalé chez des patients qui en étaient à leur premier épisode de schizophrénie et qui n’avaient encore jamais reçu de médicament, et a été associé à des symptômes négatifs de même qu’à un déclin cognitif1.

Plus précisément, des symptômes psychotiques de patients atteints de schizophrénie ont été associés à l’intégrité des faisceaux frontaux et, chez ces patients, le blocage des récepteurs dopaminergiques par un traitement à courte durée d’action de 6 semaines a permis une remyélinisation, normalisant ainsi la substance blanche2.

Les antagonistes dopaminergiques, surtout les antipsychotiques à action prolongée (APAP), sont associés à un effet de remyélinisation.

Les APAP pourraient avoir un effet plus prononcé sur la substance blanche.

Comparativement aux antipsychotiques (AP) oraux, les APAP pourraient avoir un effet plus prononcé sur le volume de substance blanche.  Dans une étude où l’on évaluait le volume de substance blanche dans les lobes frontaux après 6 mois de traitement par un APAP ou un AP oral, le volume de substance blanche dans les lobes frontaux était demeuré stable chez les patients traités par un APAP alors qu’il avait diminué chez les patients recevant un AP oral3.

 

Corrélation entre myélinisation accrue et amélioration des symptômes négatifs

Ces effets de myélinisation sont cliniquement significatifs, comme l’ont montré les résultats préliminaires d’une étude du groupe du Pr Brambilla sur l’évolution des symptômes chez 10 patients présentant des psychoses affectives ou non affectives qui recevaient un APAP ainsi que sur sa corrélation avec l’évolution de la fraction d’eau piégée dans la myéline sur 12 mois.

Selon les résultats, l’atténuation des symptômes négatifs mise en évidence sur l’échelle PANSS était corrélée avec une myélinisation accrue dans plusieurs régions du cerveau au fil du temps, notamment le corps calleux, la capsule interne et, en particulier, le faisceau occipito-frontal inférieur4.

Corrélation entre myélinisation accrue et amélioration du score PANSS

De nombreux agents psychotropes – depuis le lithium et les antipsychotiques jusqu’aux inhibiteurs du recaptage de la sérotonine et aux inhibiteurs de l’acétylcholinestérase – se sont révélés efficaces dans un vaste éventail de troubles psychiatriques, notamment l’autisme, la schizophrénie, la dépression et le trouble bipolaire. Cela pourrait indiquer que les symptômes et les traitements psychiatriques partagent un mécanisme commun, ce qui fait de la myéline une éventuelle cible novatrice des traitements en psychiatrie5.

Références

  1. Zeng B, et al. Abnormal white matter microstructure in drug-naive first episode schizophrenia patients before and after eight weeks of antipsychotic treatment. Schizophr Res. 2016;172:1-8.
     
  2. Ebdrup BH, et al. Frontal fasciculi and psychotic symptoms in antipsychotic-naive patients with schizophrenia before and after 6 weeks of selective dopamine D2/3 receptor blockade. J Psychiatry Neurosci. 2016;41:133-41.
     
  3. Bartzokis G, et al. Long acting injection versus oral risperidone in first-episode schizophrenia: differential impact on white matter myelination trajectory. Schizophr Res. 2011;132:35-41. 
     
  4. Brambilla P. University of Milan, Italy. Preliminary results. Presented at WSFBP Virtual 2021.
     
  5. Bartzokis G. Neuroglialpharmacology: myelination as a shared mechanism of action of psychotropic treatments. Neuropharmacology. 2012;62:2137-53.