Intégrer différentes stratégies pour sortir d’un cercle vicieux

Il est tellement facile pour un patient aux prises avec la migraine de tomber dans un cercle vicieux : plus il prend de médicaments ponctuels, moins ces derniers sont efficaces. Lors d’entretiens ayant eu lieu au Sommet mondial de la migraine de 2023, trois expertes du domaine se sont penchées sur les difficultés auxquelles se heurtent les patients et les stratégies qu’ils peuvent adopter pour briser le cercle vicieux :  la Dre Stephanie J. Nahas, professeure agrégée, Thomas Jefferson University, Philadelphie, États-Unis; la Dre Gisela Terwindt, professeure titulaire de neurologie, Centre médical universitaire de l’Université de Leyde, Pays-Bas; et la Dre Judith Owens, professeure titulaire de neurologie, Harvard Medical School, Boston, É.-U.

Il est dommage qu’aucun traitement contre la migraine ne soit efficace chez tout le monde1. Cette réalité multiplie les difficultés de la prise en charge de la migraine et peut donner lieu à un cercle vicieux : plus le patient prend de médicaments ponctuels, moins ces derniers sont efficaces2.

Les patients aux prises avec la migraine risquent alors de commencer à croire qu’ils ont tout essayé et que rien ne fonctionne. Dans les faits, même si les patients ont souvent essayé de nombreuses approches médicamenteuses et non médicamenteuses, il existe toujours une option de plus1.

Les perturbations du sommeil y sont pour quelque chose

Il existe de nombreux facteurs de risque de migraine. Comme l’a souligné la Pre Owens, il est intéressant de noter qu’une perturbation du rythme circadien peut alimenter directement le cercle vicieux : les épisodes migraineux sont fréquents tôt le matin, et les patients aux prises avec la migraine étaient plus fatigués que les témoins après un changement des habitudes du sommeil3.

En présence de douleur migraineuse, il est non seulement plus difficile de s’endormir, mais aussi de rester endormi. Les troubles du sommeil comme l’insomnie sont 2 à 8 fois plus fréquents chez les personnes aux prises avec la migraine4,5. Si le sommeil perturbé persiste, la sensibilité et la tolérance à la douleur de même que la perception et l’intensité de la douleur s’aggravent toutes4.

Un sommeil perturbé accentue l’intensité de la douleur et diminue la tolérance à la douleur

Bref, il est très facile qu’un patient entre dans un cercle vicieux. La Pre Terwindt2 nous a exposé le scénario suivant : Un patient se réveille avec un léger mal de tête. Il se demande : cette céphalée demeurera-t-elle légère ou évoluera-t-elle vers une crise migraineuse? Ayant des engagements ce jour-là, le patient ne veut pas courir le risque d’avoir un épisode migraineux et décide donc de prendre un médicament ponctuel. Le lendemain, la journée commence de la même façon.  

On imaginera aisément que le patient en fasse une habitude. Avant longtemps, il sera incapable de déterminer si sa céphalée est un épisode migraineux ou la conséquence de la prise fréquente de son médicament ponctuel2.

Stratégies pour aider les patients à surmonter leurs difficultés

Le maintien d’une bonne hygiène de sommeil peut être utile alors qu’un sommeil de piètre qualité contribue au problème. Les patients doivent tenter de toujours se coucher et se lever à la même heure, de ne pas utiliser de dispositifs électroniques avant d’aller au lit, de dormir dans une chambre tranquille, fraîche et obscure, et de ne pas faire de sieste de plus de 30 minutes en fin d’après-midi4.

De façon générale, pour de nombreux patients aux prises avec une migraine chronique, il n’y a pas de début précis ni de fin précise à un épisode migraineux1. Selon la Pre Nahas, ce qui embête le plus les patients, c’est de savoir comment choisir les jours où ils peuvent prendre un médicament ponctuel, sachant que l’abus de ces médicaments pourrait aggraver leur migraine1.

Il est difficile pour les patients de savoir quand prendre un médicament ponctuel, sachant que l’abus de tels médicaments pourrait aggraver leur migraine

La tenue d’un journal peut être utile, mais les patients se fatiguent rapidement de noter tous les détails de leurs épisodes migraineux1. La Pre Nahas dit à ses patients que s’ils devaient prendre note d’un seul aspect, ce devrait être les jours où ils ont besoin de médicaments supplémentaires pour traiter une crise. De plus, elle leur conseille généralement de restreindre la prise de médicaments ponctuels à 2 ou 3 jours par semaine1.

Autre stratégie possible : de concert avec le patient, énumérer les approches déjà essayées, en divisant celles qui n’ont rien changé et celles qui auraient pu fonctionner, mais dont l’efficacité était insuffisante ou s’est estompée avec le temps. Cet exercice pourrait mettre au jour de nouvelles possibilités, comme l’ajout d’un médicament préventif ou d’une thérapie comportementale à l’une des approches déjà essayées qui avaient du potentiel1.

Briser le cercle vicieux

Lorsque le nombre de jours avec céphalée atteint 4 à 7 par mois, les médicaments ponctuels peuvent ne plus suffire; il est alors temps d’envisager un médicament préventif1. Si on ne s’attaque pas au problème assez tôt, le cercle vicieux peut s’aggraver et évoluer vers une céphalée par abus médicamenteux (CAM), le médicament lui-même étant alors la cause de la céphalée2. Les médicaments préventifs jouent un rôle clé en contribuant étroitement à briser le cercle vicieux, tant avant l’apparition d’une CAM qu’après le traitement réussi d’une CAM2.

Les cliniciens peuvent offrir aux patients des traitements préventifs administrés expressément pour briser le cercle vicieux, notamment en leur donnant congé de leurs médicaments ponctuels usuels et en les aidant à mieux gérer les épisodes migraineux subséquents1. Les patients aux prises avec des épisodes migraineux tôt le matin pourraient bénéficier, en particulier, de traitements préventifs dotés d’une longue demi-vie4.

Le recours à des médicaments qui brisent le cercle vicieux permet au patient de prendre congé de ses médicaments ponctuels

Une étude menée aux Pays-Bas a révélé qu’un retrait de courte durée des médicaments incriminés sans l’ajout d’un autre traitement pourrait aussi être efficace6. De l’avis de la Pre Terwindt, la clé est de découvrir la fréquence « naturelle » des épisodes migraineux du patient (c.-à-d., sans CAM) vers la fin du retrait et ensuite de déterminer si un traitement préventif s’impose2.

Quelles que soient les stratégies utilisées, il est essentiel que le patient travaille main dans la main avec son médecin pour trouver la solution qui lui convienne personnellement. Le processus doit se dérouler dans un climat de collaboration1,2.

Les faits saillants du symposium rapportés par nos correspondants se veulent une représentation juste du contenu scientifique présenté. Les opinions et les points de vue exprimés sur cette page ne reflètent pas forcément ceux de Lundbeck.

Références

  1. Transcript of interview of Stephanie J. Nahas by Amy Mowbray, Migraine World Summit 2023.
  2. Transcript of interview of Gisela Terwindt by Wendy Bohmfalk, Migraine World Summit 2023.
  3. Van Oosterhout WPJ, et al. Cephalalgia 2018;30(4):61725.
  4. Transcript of interview of Judith Owens by Wendy Bohmfalk, Migraine World Summit 2023.
  5. Tiseo C, et al. J Headache Pain 2020;21(1):126.
  6. Pijpers JA, et al. Brain 209;142(5):120314.