Diabète et troubles de santé mentale : un lien complexe

La présence simultanée d’un trouble psychiatrique et du diabète est fréquente, et le lien étroit entre ces maladies fait l’objet d’un chapitre entier des Lignes directrices de pratique clinique de Diabète Canada. Le 20 octobre 2023, lors du congrès annuel de l’Association des psychiatres du Canada, à Vancouver, le Dr David Robinson, psychiatre (London, Ontario) et auteur principal de ce chapitre, a présenté une affiche soulignant les aspects clés du fardeau, du dépistage, de la prise en charge et de la surveillance d’un diabète nouveau ou préexistant en présence de troubles psychiatriques.

Lien complexe et bidirectionnel entre santé mentale et santé métabolique

Un large éventail de troubles psychiatriques sont associés à un risque accru de diabète, particulièrement de diabète de type 2 (DT2). Il est largement reconnu que le trouble dépressif majeur (TDM), les troubles bipolaires et les troubles du spectre de la schizophrénie sont associés à un risque accru de DT2, mais d’autres troubles augmentent également le risque de DT2, notamment : troubles liés à l’abus de substances, traumatismes, troubles des conduites alimentaires , troubles du neurodéveloppement, troubles de la personnalité, troubles neurocognitifs, dysphorie de genre et troubles de l'alternance veille-sommeil.

Le risque de diabète est de 2 à 3 fois plus élevé chez les personnes aux prises avec un trouble du spectre de la schizophrénie

À l’inverse, le diabète augmente le risque de divers troubles psychiatriques, notamment : dépression, anxiété, troubles liés à l’abus de substances, troubles neurocognitifs, troubles des conduites alimentaires, dysfonctions sexuelles et troubles de l'alternance veille-sommeil.

Le risque de TDM est 2 fois plus élevé chez les personnes atteintes de diabète qu’au sein de la population générale

Les mécanismes qui sous-tendent ces associations bidirectionnelles sont plurifactoriels et complexes et, bien qu’ils ne soient complètement élucidés, ils relèvent fort probablement de la convergence de facteurs biologiques, environnementaux, psychosociaux ou liés aux habitudes de vie. La perturbation du cycle veille-sommeil est un facteur important contribuant à l’association entre le risque de diabète et les troubles psychiatriques. De fait, en ce qui concerne l’augmentation du risque de DT2, la perturbation du cycle veille-sommeil est comparable aux facteurs de risque classiques comme l’embonpoint ou l’obésité, les antécédents familiaux et l’inactivité physique.

La perturbation du cycle veille-sommeil est un important facteur de risque de diabète

Fait important, comparativement aux personnes atteintes uniquement de diabète, les patients atteints à la fois d’un trouble psychiatrique et de diabète ont des résultats de santé moins favorables, notamment : taux plus élevés de morbidité et de mortalité liées au diabète, moindre qualité de vie/capacité fonctionnelle, et coûts plus élevés liés aux soins de santé. Inversement, la présence de diabète augmente le risque de réhospitalisation chez les personnes atteintes d’un trouble bipolaire ou psychotique.

Médicaments psychotropes et risque de diabète

Bien que certains facteurs de risque de diabète ne soient pas modifiables, le clinicien peut prendre certaines mesures pour réduire le risque de diabète chez le patient aux prises avec un trouble mental. Par exemple, le traitement médicamenteux sélectionné peut influer sur le risque de diabète, notamment s’il tend à induire une prise de poids. Les Lignes directrices de Diabète Canada renferment un tableau utile indiquant le potentiel de gain de poids , qualifié d’improbable à préoccupant, selon le psychotrope utilisé.

Au regard du risque de diabète, les médicaments psychotropes ne sont pas tous comparables

Au regard du risque de troubles métaboliques, les antipsychotiques (AP) soulèvent des préoccupations en tant que classe, mais envisagés séparément, ils présentent une grande variabilité; notamment, les AP atypiques de 3e génération sont associés au risque le plus faible de gain de poids et de troubles métaboliques. Outre un gain de poids, les AP peuvent entraîner un risque accru de diabète par un effet direct sur les voies de signalisation intracellulaire de l’insuline et la réponse des cellules bêta à la glycémie, et une perturbation des voies de transmission cholinergique.

Les AP de 3e génération associés à un risque moindre de gain de poids sont recommandés dans les lignes directrices de Diabète Canada

Surveillance : recommandations pratiques

Compte tenu du lourd fardeau qu’imposent les troubles métaboliques et les troubles mentaux concomitants, il importe de repérer les facteurs de risque et de les prendre en charge sans délai. À cette fin, Diabète Canada propose dans ses lignes directrices des recommandations pratiques pour l’évaluation initiale et le suivi systématique des paramètres cliniques et biologiques , ainsi que des antécédents médicaux et familiaux.

Les faits saillants du symposium rapportés par nos correspondants se veulent une représentation juste du contenu scientifique présenté. Les opinions et les points de vue exprimés sur cette page ne reflètent pas forcément ceux de Lundbeck.

Références

  1. Robinson et al. Can J Diabetes 2023;47:308-44.